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La transition énergétique du secteur maritime 

Ecrit par Brian Wambua

31 janvier 2024

Près de 80% des marchandises dans le monde sont transportées par voie maritime. Or, ce secteur compte environ 3% des émissions de gaz à effet de serre. C'est l'une des sources d'émissions de gaz à effet de serre qui connaissent la croissance la plus rapide et qui conduisent au changement climatique (32 % lors des 20 dernières années). Cela est dû à la croissance du commerce et du transport de passagers. Si aucune action n’est prise, ces émissions peuvent atteindre 17% en 2050. Sile transport maritime était exclusivement dépendant des énergies fossiles à ses débuts, l’ urgence écologique pousse les acteurs de ce secteur à envisager une sérieuse réduction des empreintes carbones. Il faut alors une réponse coordonnée impliquant différents acteurs pour que la transition vers des économies fondées sur la neutralité carbone soit un succès du transport de passagers. Si aucune action n’est prise, ces émissions peuvent atteindre 17 % en 2050. Si le transport maritime était exclusivement dépendant des énergies fossiles à ses débuts, l’urgence écologique pousse les acteurs de ce secteur à envisager une sérieuse réduction des empreintes carbones. Il faut alors une réponse coordonnée impliquant différents acteurs pour que la transition vers des économies fondées sur la neutralité carbone soit un succès.

La transition écologique et énergétique du maritime implique généralement la collaboration entre différents acteurs, tels que gouvernements, entreprises, organisations non gouvernementales et experts du secteur. Les étapes typiques incluent la définition d'objectifs communs, l'élaboration de politiques, la recherche de financements et la sensibilisation. Des travaux sont entrepris par les Etats pour la création de coalition pour la transition écologique et énergétique visant souvent à promouvoir des pratiques maritimes durables, à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à encourager l'adoption de technologies plus respectueuses de l'environnement dans le domaine maritime. 

Dès 2100, les niveaux des mers s’élèveront d’un à 2 mètres, mettant environ 14% des grands ports dans le monde face aux risques d'inondation, de tempêtes et d’érosion. Les ports français, dont 66 sont utilisés pour le commerce maritime, sont menacés et devront améliorer leurs infrastructures. Or, la plupart des ports n’ont pas encore établi des mesures afin de lutter contre le changement climatique et continuent d’émettre une quantité importante de gaz à effet de serre .

La transition énergétique dans un port se traduit par le passage d’un port mono-énergie et consommateur d’énergie à un port pluri-énergie et producteur d’énergie. De ce fait, l’éolien en mer va profondément marquer les côtes françaises, et en premier lieu, les zones portuaires. La stratégie gouvernementale prévoit la mise en place de 50 parcs offshore d’ici 2050. Le premier parc français de 80 éoliennes a été inauguré à Saint-Nazaire en 2022. Par ailleurs, les parcs
éoliens représentent une opportunité de produire de l’hydrogène par l'électrolyse de l’eau de mer. Cela permet la production de l’hydrogène décarboné.

Il faut également repenser les liens entre la ville et le port. Les projets d’aménagement qui étaient basés sur une économie reposant uniquement sur le pétrole a déconnecté à tous niveaux la ville et le port. Les vastes zones industrialo-portuaires (ZIP) ont été créées en périphérie. Dans les villes portuaires, où les riverains, navires, commerces et activités touristiques coexistent, la qualité de l’environnement ainsi que les sources de nuisance deviennent des facteurs de mobilisation pour les habitants. Lorsque les catastrophes naturelles surviennent, les populations et leurs activités socio-économiques sont impactées (fermeture des voies de transport, arrêts d’activités etc). En 2017, le port d’Itajai au Brésil a dû fermer pendant un mois en raison de fortes précipitations.

Certains ports favorisent le déploiement de l’économie circulaire et l’écologie industrielle. Ils se sont lancés dans des projets de transition énergétique pour que les relations ville-port se transforment, à l’instar du port de La Rochelle qui s’est engagé dans des actions qui permettent de limiter son impact environnemental et énergétique. Ainsi, 7600 panneaux solaires ont été installés sur le toit de la base sous-marine en 2018.

Certes, le défi écologique est colossal et difficile à mettre en oeuvre. Toutefois, la transition énergétique nous permet de réinterpréter le rôle des ports et tant que laboratoires pour tester de nouvelles pratiques et technologies afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Afin de se conformer à l’Accord de Paris, au moins 5% du carburant utilisé dans le transport maritime doit être complètement vert d’ici à 2030.

Environ 100 000 navires seront touchés par cette transition. Ainsi, le développement de nouveaux carburants et l’utilisation accélérée de systèmes de propulsion alternatifs seront nécessaires. L'énergie à bord des navires se produit par les moteurs à combustion interne qui rejettent forcément des gaz brûlés.

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Néanmoins, trois technologies montrent qu’il existe des alternatives:

  • L'hydrogène semble être une alternative possible pour les petites navettes de 60 à 80 places. Certains le considèrent comme la clé de la décarbonation du maritime. Des projets plus ambitieux ont été achevés, à l'instar du remorqueur "Hydrotug" pour le port d'Anvers. Toutefois, cette technologie est encore chère. De plus, elle déplace le problème sur la production de l'hydrogène, qui est réalisée à 95 % à partir de carburants d'origine fossile.

  • Par ailleurs, le retour de la propulsion éolienne est une proposition dans la décarbonation du transport maritime. Elle présente l'avantage d'être illimitée, non polluante et économe en énergie. Elle permet également au navire de bénéficier d'une grande autonomie. Toutefois, cette technologie n'est pas très compatible avec la planification de voyages réguliers sans avoir besoin de motorisations thermiques auxiliaires conséquentes. Elle est également peu adaptée aux navires de grande taille. 

  • En ce qui concerne l'énergie nucléaire, il s'agit de produire de la vapeur à bord pour alimenter des turbines. A part cette vapeur d'eau, il n'y a pas d'autres déchets. L'industrie nucléaire civile s'oriente vers la fabrication en série de micro-réacteurs mobiles qui peuvent s'aligner aux besoins des navires. Grace à cette technologie, les navires peuvent bénéficier d'une grande autonomie. Cependant, elle pose le problème du traitement des déchets et de son acceptation politique. Des questions se posent également en lien avec les enjeux de sécurité.​

 

L'électricité joue aussi un rôle croissant. Grace à l'alimentation électrique, les navires peuvent couper leurs moteurs pour éviter les polluants atmosphérique ainsi que les bruits et vibrations. Le premier port à avoir installé cette technologie en France était Marseille, dans son plan "Escales Zéro Fumée". Dans le paquet "Fit for 55", l'Union Européenne a fixé l'obligation pour les principaux ports européens d'avoir des prises électriques à quai au plus tard 2030.​

Les moteurs à combustion interne vont probablement dominer la propulsion des navires. Toutefois, il est possible de jouer sur les carburants afin d’améliorer le bilan environnemental des navires:

  • La production de masse de l'ammoniaque avait été écartée jusqu'à présent à cause de sa toxicité et de sa faible inflammabilité. Désormais, les recherches les plus prometteuses reposent sur une combinaison de 70 % ammoniaque et 30 % de Maritime Gas Oil (MGO). Comparé à l'hydrogène, l'ammoniaque se stocke plus facilement. Par ailleurs, son cout de production est très faible. Il s'agit toute fois d'un produit toxique. De plus il est fabriqué à partir d'énergies fossiles. Enfin, il doit être mélangé avec un carburant fossile plus volatile. 

  • Le GNL couplé au MGO ou "flex fuel". L'atout principal du gaz naturel liquéfié (GNL) est la réduction drastique des émissions de combustion. Il ne nécessite pas de modifications importantes des technologies de propulsion actuelles, ce qui permet d'atteindre les objectifs de décarbonation rapidement, et pour un investissement limité. Il présente l'inconvénient d'un besoin massif d'additifs de lubrification et s'appuie sur les ressources fossiles. 

  • Les MGO "blended" de nouvelle génération. Il s'agit de l'intégration de carburants issus de la production agricole, à l'instar des éthyles ou des produits pétroliers recyclés de type huiles de vinaigre ou huiles végétales recyclées, ce qui permet l'optimisation des déchets. Toutefois, la production est coûteuse. En plus, le coût écologique est sujet de polémique en raison de l'usage massif de l'eau.

 

Il faut comprendre que même si le coût de l'adaptation est cher, le coût de la non adaptation sera encore plus élevé.​

Certes, la décarbonation du transport maritime est cruciale pour l'environnement. Toutefois, sa réalisation peut être problématique. Il y a de nombreuses limites quant au niveaux technologique, des infrastructures, du développement des technologies, environnemental et juridique.

En effet, les technologies et les carburants préconisés pour la transition écologique et énergétiques du transport maritime sont pour la plupart encore à leurs phases expérimentales; une phase expérimentale qui peut prendre un certain temps et retarder donc leur mise sur le marché ainsi que la réalisation de l'objectif de réduction des gaz à effet de serre. D'ailleurs, le secteur maritime dépend encore énormément des énergies fossiles. Ainsi, la transition totale de la flotte mondiale et des infrastructures portuaires aux énergies et technologies vertes nécessite un investissement colossal qui n'est peut-être pas à la portée de tous.

 

BIBLIOGRAPHIE

  1. Ports français : une transition énergétique nécessaire. (2022, 7 décembre). https://www.vie-publique.fr/eclairage/286999-changement-climatique-la-transition-energetique-des-ports-francais

  2. VALERO, C. (2022). L’adaptation des ports maritimes aux conséquences du changement scientifique. Les Notes de Synthèse de l’ISEMAR, N°219.

  3. de Ricqlès, J. (2021, 26 janvier). Les solutions techniques pour verdir le transport maritime. https://market-insights.upply.com/fr/les-solutions-techniques-pour-verdir-le-transport-maritime

  4. Roche, S. (2021, 11 mai). Face au défi énergétique, l’urgence de réinventer les ports. The Conversation. https://theconversation.com/face-au-defi-energetique-lurgence-de-reinventerles-ports-159281

  5. Cluster Maritime Français. (2022). Coalition pour la Transition Eco-Energétique du Maritime (T2EM) - CMF. https://www.cluster-maritime.fr/la-filiere-maritime/les-enjeuxmaritimes/coalition-pour-la-transition-eco-energetique-du-maritime-t2em/

  6. BANEL Éric, « Le shipping sur la transition énergétique », Revue Défense Nationale, 2015/9 (N°784), p. 71-76. DOI : 10.3917/rdna.784.0071. URL : https://www.cairn.info/revue-defense-nationale-2015-9-page-71.htm

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